« Impact » d’Olivier Norek et Frédéric Pontarolo

Je referme les mains tremblantes, la gorge nouée et les yeux embués, ce roman graphique adapté du roman éponyme d’Olivier Norek, avec Frédéric Pontarolo au dessin. Je suis dans le même état qu’après ma lecture du roman graphique Les Algues vertes d’Inès Léraud, gagnée par un écœurement immense, une envie de lever mon maigre poing face à ces géants de l’agrochimie, la pétrochimie, à ces temples de la consommation (et du gaspillage), à ces tueurs de générations futures.

Nous suivons le personnage de Solal, ancien militaire, de ceux que les médias nomment des « éco-terroristes » – comment peut-on appeler ainsi ceux qui se battent pour protéger la nature ? Au début du récit, il tient en otage le PDG de Total et réclame une caution qui permettrait de réparer le mal causé par son entreprise depuis des années, polluant pour le profit, forant des océans, tuant l’humanité et la biodiversité à petits feux. S’il ne l’obtient pas, l’homme sera asphyxié avec ce gaz que Total connaît si bien – et ce sera le coup de l’asphyxieur asphyxié. S’en suivra une autre prise d’otage, et toujours ces mêmes revendications : arrêtez de détruire la planète, la faune et la flore, arrêtez de penser que ses ressources sont infinies, arrêtez d’accoler le mot « naturelles » aux catastrophes qui sont causées par les Hommes. Très vite, Solal connaît plus de soutiens que de détracteurs, le masque de panda qu’il brandit est adopté par ceux qui approuvent son noble combat. Le commissaire de police en charge de l’affaire et la profileuse sont eux aussi vite convaincus que le juste se tient du côté de « l’agresseur », que faire justice soi-même est ici légitime.

Ce roman graphique m’a totalement subjuguée, fascinée, bouleversée. Chaque page est un choc visuel, chaque scène est un crève-cœur. On en apprend, de terribles choses, en la parcourant car Olivier Norek étaye son scénario d’arguments, de chiffres, de statistiques que nous découvrons à travers la voix de Solal ou de ses avocats.

Moi qui me pensais sensibilisée à la cause écologique, je réalise à quel point je suis aveugle face à ce qui se passe ailleurs, à quel point ce que je crois être une part de colibri n’est que l’insignifiance même. J’imagine que ce roman graphique est encore plus impactant que le roman dont i s’inspire – pour reprendre le titre – étant donné la vigueur du trait, la puissance de couleurs qui m’ont parfois fait suffoquer, la véracité de certaines scènes qui m’ont donné l’impression que, moi aussi, je me noyais dans un océan de plastique.

Ce roman graphique est à mettre entre toutes les mains, en particulier dans celles de ceux qui pensent qu’après eux pourra éclater le déluge, de ceux qui achètent sans se poser des questions ni sur le traitement qu’ont pu subir les animaux qu’ils mangent, ni sur la provenance des vêtements qu’ils achètent, de ceux qui « ont la flemme » de trier leur déchets ou leurs mails, qui gaspillent à n’en plus finir, qui prennent un avion quand un train met à peine le double de temps.

Merci Olivier Norek, merci Frédéric Pontarolo pour ce plaidoyer, qui alerte, qui secoue, fait prendre conscience. Merci.

Livre reçu dans le cadre de la Masse Critique de Babelio